Cécilia GONDARD
Publié le 13/02/2017

Cécilia GONDARD

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Déductions fiscales pour les professions libérales exerçant en France

Session de mars 2017 - Question orale n°3 de Mme Cécilia GONDARD, conseillère consulaire à Bruxelles et conseillère AFE pour le Benelux

Les Français de l’étranger qui travaillent en France en profession libérale et sont imposés sur leur revenu en France n’ont pas droit aux même déductions fiscales que leurs homologues résident fiscalement en France. Pourriez-vous indiquer la liste des déductions fiscales dont ils bénéficient ainsi que celles dont ils ne bénéficient pas ?

Tout d’abord, les règles en matière de territorialité de l’impôt sur le revenu se fondent sur le critère de résidence et non de nationalité. En disposer autrement pour réserver un traitement particulier à certains non résidents sur le seul fondement de leur nationalité française, serait à la fois contraire à notre Constitution, au droit européen et au droit conventionnel. À cet égard, les Français de l’Étranger relèvent par conséquent à titre principal des règles d’imposition en vigueur dans leur État de résidence, notamment pour la prise en compte des charges qu’ils supportent.

En application des dispositions de l’article 4 A du code général des impôts (CGI), et contrairement aux personnes fiscalement domiciliées en France au sens de l’article 4 B du même code qui sont soumises à l’impôt sur l’ensemble de leurs revenus, qu’ils soient de source française ou de source étrangère, les personnes fiscalement non-résidentes en France sont imposables sur leurs seuls revenus de source française, sous réserve des dispositions des conventions internationales.

C’est pour tenir compte de cette différence objective de situation entre résidents et non-résidents que, conformément à l’article 164 A du CGI, les personnes qui n’ont pas leur domicile fiscal en France et qui sont, de ce fait, soumises à une obligation fiscale limitée ne peuvent déduire aucune charge de leur revenu global.

Il en est de même pour la plupart des réductions et crédits d’impôt sur le revenu. Ainsi, les réductions et crédits d’impôt sont réservés aux personnes fiscalement domiciliées en France ou considérées comme des "non-résidents Schumacker", à l’exception de la réduction d’impôt pour investissement locatif dans le secteur touristique et du crédit d’impôt au titre des assurances pour loyers impayés qui sont accordés quel que soit le lieu du domicile du contribuable (BOI-IR-RICI §20).

Les "non-résidents Schumacker" au sens de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union Européenne (CJUE, arrêt du 14 février 1995, affaire C-279-93, Schumacker) peuvent, toutes conditions étant par ailleurs remplies, faire état pour la détermination de leur impôt sur le revenu des charges admises en déduction de leur revenu global (cf. également le BOI-IR-DOMIC-40).

En effet, la doctrine administrative a tiré les conséquences de l’arrêt « Schumacker » du 14 février 1995, affaire C 279/93, aux termes duquel la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a jugé que les contribuables non-résidents devaient être assimilés à des personnes fiscalement domiciliées en France, au sens du droit interne, tout en restant soumises à une obligation fiscale limitée, au sens des conventions internationales, lorsqu’ils tirent de la France la majorité ou la quasi-totalité de leurs revenus. Sont concernés les contribuables, qui sont domiciliés dans un autre État membre de l’Union européenne (UE), ou dans un État partie à l’Espace économique européen (EEE) ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l’évasion fiscale.

Dès lors, ces « non-résidents Schumacker » peuvent retrancher de leur revenu global certaines charges, parmi lesquelles celles énumérées au II de l’article 156 du code général des impôts (également énoncées au BOI-IR-BASE-20-10). Il en va de même s’agissant des réductions et/ou crédit d’impôt, énumérés au BOI-IR-RICI.

Le bénéfice de ces dispositions n’est pas ouvert aux non-résidents établis dans les États autres que ceux cités, En effet, d’une part, la transposition en doctrine fiscale des principes posés par l’arrêt « Schumacker » précité découle de l’obligation à laquelle est tenue la France de respecter les principes communautaires, tels qu’ils sont interprétés par la CJUE, et notamment le principe de la libre circulation des personnes et de liberté d’établissement au sein de l’UE et de l’EEE, principe communautaire qui ne trouve pas à s’appliquer pour les résidents des autres États avec lesquels la France n’a pas conclu d’accord équivalent, d’autre part, cette jurisprudence est susceptible de s’appliquer à tous les États membres, ce qui implique une réciprocité aux termes de laquelle un Français imposé dans un autre État membre peut, le cas échéant, se prévaloir des principes posés par l’arrêt « Schumacker ».

Documentation :
 QE n°100351 de M. Pierre-Yves LE BORGN’ publiée au Journal Officiel (JO) le 1er novembre 2016 et dont la réponse a été publiée au JO le 7 février 2017 :
http://questions.assemblee-nationale.fr/q14/14-100351QE.htm
 Doctrine liée à la situation des non-résidents tirant de France l’essentiel de leurs revenus imposables (« Non-Résidents Schumacker ») :
BOI-IR-DOMIC-40 (http://bofip.impots.gouv.fr/bofip/7666-PGP.html)
 Liste des réductions et crédits d’impôts dont peuvent bénéficier les non-résidents (hors Schumacker) :
BOI-IR-RICI §20 (http://bofip.impots.gouv.fr/bofip/5955-PGP.html)
 Liste des charges admises en déduction pour les personnes fiscalement domiciliées en France :
BOI-IR-BASE-20-10 (http://bofip.impots.gouv.fr/bofip/1249-PGP.html)
 Liste des réductions/crédits d’impôts admis en déduction pour les personnes fiscalement domiciliées en France :
BOI-IR-RICI (http://bofip.impots.gouv.fr/bofip/5955-PGP.html)

Origine de la réponse : DGFIP