Protection sociale des Français retraités hors d’Europe et hors Maghreb ayant cotisé moins de 15 ans au titre d’un régime français de sécurité sociale
Question écrite de Mme Annie MICHEL, conseillère consulaire (New-York) et conseillère AFE (Etats-Unis)
Les Français retraités vivant hors d’Europe ou hors Maghreb pouvaient, jusqu’au 31 décembre 2018, bénéficier, lors de leur séjour en France, de la protection sociale et de la carte vitale, sous condition qu’ils aient liquidé une pension d’une durée d’assurance d’un trimestre au titre d’un régime français.
Or, l’article 52, II 4e b de la loi des finances du 23 décembre 2018, augmente considérablement la durée de cotisation nécessaire, puisque depuis le 1er janvier 2019, seules sont couvertes « les personnes dont la pension rémunère une durée d’assurance supérieure ou égale à quinze années au titre d’un régime français ».
D’une part, ce saut de près de 15 ans de cotisations représente une mesure discriminatoire par rapport à l’âge. L’implémentation sans aucune transition dans le temps de cette nouvelle condition fera que les cotisants proches de l’âge de la retraite devront liquider leur pension sans avoir pu anticiper le paiement de cotisations volontaires qui auraient pu les rattacher à la couverture maladie de la Sécurité sociale.
D’autre part, cette nouvelle mesure aura un impact indéniable et injuste pour les Français de l’étranger. Pour rappel, les entreprises qui emploient certains de nos concitoyens vivant à l’étranger ne cotisent pas, pour eux, de manière obligatoire au régime de l’assurance vieillesse en France sauf lorsqu’il s’agit de contrats d’expatriation, de plus en plus rares. Il existe les cotisations volontaires assurance-vieillesse via la Caisse des Français de l’Étranger (CFE) mais le cotisant volontaire doit payer le plus souvent après avoir été taxé dans son pays de résidence et après avoir cotisé, en plus, au régime de sécurité sociale local, ce qui rend ces cotisations hors de portée financière pour une grande majorité des citoyens. Tous les Français de l’étranger qui auront cotisé moins de quinze ans au titre d’un régime de Sécurité sociale en France ne pourront ainsi plus bénéficier de la protection sociale, ni de la carte vitale. Cette cotisation volontaire est hors de portée pour de nombreux compatriotes.
Qu’y a-t-il de prévu pour tenir compte de ces problématiques ? Comptez-vous vraiment couper de manière irréversible le lien qui existait entre la grande majorité des Français de l’étranger et l’accès à l’assurance maladie de la Sécurité sociale lors de la liquidation de leur retraite ?
A compter du 1er juillet 2019, les pensionnés résidant à l’étranger pourront bénéficier de la prise en charge de leurs frais de santé (soins urgents et soins programmés) lors de leurs séjours temporaires en France dès lors qu’ils auront cotisés pendant au moins 15 ans en France ou, qu’en vertu des dispositions d’une convention bilatérale de sécurité sociale conclues avec des Etats hors Union européenne, la France reste compétente en matière d’assurance maladie dans l’Etat de résidence.
Cette clause des 15 ans existait déjà pour les travailleurs de nationalité étrangère. Il s’agit-là non seulement d’une mesure d’égalité de traitement qui rompt une discrimination à la nationalité, mais également une mesure d’équilibre. En effet, il est important de rappeler que l’assurance maladie française repose sur un principe de solidarité tout autant que sur le principe assurantiel suivant : l’assuré cotise et bénéficie en contrepartie de prestation de santé. Ainsi, fixer une limite d’années d’assurance en France en deçà de laquelle il est considéré que la cotisation que verseraient les pensionnés d’un régime français serait trop faible pour justifier l’ouverture de droits à l’assurance maladie est une mesure d’équilibre entre le bénéfice d’un droit et la contributivité attendue. Par conséquent, un pensionné ne résidant pas en France qui aurait cotisé un seul trimestre en France pendant toute sa carrière ne peut prétendre à la prise en charge de ses frais de santé lors de ses séjours en France.
Par ailleurs cette mesure a été présentée au Parlement, qui a convenu de son équité sachant notamment que nous rétablissions la prise en charge des enfants mineurs à charge de ces pensionnés et qu’elle était également mentionnée dans son rapport par la députée Anne Genetet au titre des recommandations formulées. Enfin très peu de nos compatriotes résidant à l’étranger seraient concernés, la plupart d’entre eux ayant cotisés en France plus de 15 ans (le dernier rapport de la DREES sur les retraites indique que les retraités de la génération 1926 résidant à l’étranger valident en moyenne 79 trimestres, soit 19,75 années ; pour la génération 1946, ils valident en moyenne 113 trimestres, soit 28,25 années, source : Les retraités et les retraites, édition 2018, DREES).
Origine de la réponse : DSS