Problèmes de transcription d’actes d’état civil à Tamatave en particulier et à Madagascar sur un plan général
Question écrite de M. Jean-Daniel CHAOUI, membre élu de la circonscription électorale de Tananarive
QUESTION
Les demandes de transcription d’actes d’état civil représentent, à Madagascar, un volume de demande très important, actes de naissance et actes de mariage en particulier. L’administration malgache connaît de très grandes difficultés dans la tenue de ses registres d’état civil ce qui contraint les services consulaires français à effectuer, de façon quasi systématique, des vérifications d’actes « in situ ». Cette procédure, lorsque l’on observe d’une part le très grand nombre de mairie et leur dispersion dans un territoire plus grand que la France, et d’autre part la faiblesse des effectifs d’agents dédiés à ces contrôles, place les services du Consulat dans une situation quasi insurmontable. Il en résulte des délais de transcription qui s’étalent de plusieurs mois à plus d’une année. Convenons que ce constat est problématique.
Les dysfonctionnements de l’administration malgache entrainent cette dernière à produire des actes qui sont jugés non-valides par l’administration consulaire française qui refuse alors de les transcrire et transmet, avec avis circonstanciés donc défavorables, les dossiers au Procureur de la République de Nantes pour jugement. Celui-ci, suivant l’avis du Consulat général, renvoie quasi-systématiquement une notification de refus de transcrire aux familles. Au mieux, les familles sont invitées à produire des documents complémentaires d’une grande complexité, difficultés qu’elles ne parviennent pas à surmonter. L’administration leur propose alors d’engager une procédure judiciaire auprès du Tribunal de Grande Instance de Nantes, procédure qu’elles sont dans l’incapacité d’engager pour des raisons financières et sociales.
Près d’une centaine de familles françaises sont ainsi tombées dans un piège sur lequel elles ne peuvent agir, alors qu’elles ne sont responsables en rien des errements de l’Etat Civil malgache. J’ai alerté l’administration consulaire à Tananarive et à Paris de la gravité de cette situation, car certaines familles attendent une solution depuis 2008. Les enfants, non-transcrits, ne peuvent pas être inscrits sur le registre des Français de l’étranger, ce qui les exclut d’une scolarité dans les établissements de l’AEFE pour tous ceux qui ne peuvent faire face aux frais d’écolage demandés par ces établissements. Les dégâts collatéraux qui en résultent sont désastreux et ont des conséquences gravissimes : l’apprentissage de la langue française est retardée, les familles sont séparées car souvent le père exerçant une activité dans un département français, les demandes de visa pour ses enfants sont refusés ….
Cette situation a pris une dimension médiatique à Madagascar et dans l’île de la Réunion où résident certains parents. Ceux-ci, excédés par l’immobilisme et l’indifférence de l’administration, se sont constitués en « Collectif » et ont interpellé les médias, journaux, radios et télévisions, pour faire connaître leur situation qu’ils jugent profondément injuste.
Je souhaiterais connaître l’état d’avancement de la prise de conscience de la gravité de cette situation par la Direction de l’administration des Français hors de France et les mesures qu’elle pense initier, auprès du Procureur de la République de Nantes et auprès des autorités malgaches pour résoudre ces difficultés pour le présent mais aussi pour l’avenir.
REPONSE
A plusieurs reprises, l’attention du Ministère des affaires étrangères a été appelée sur la situation de nos ressortissants à Madagascar.
De nombreuses irrégularités sont constatées dans la tenue des registres de l’état civil à Madagascar, notamment dans la commune de Tamatave. Dans des administrations fragilisées et dépourvues de moyens, les actes d’état civil sont ajoutés, surchargés, non signés, voire recollés a posteriori dans des registres non reliés. Ils sont par conséquent non conformes à la loi locale et ne peuvent être transcrits en l’état, ainsi que le précise l’article 47 du code civil, compte tenu du défaut de force probante dont ils sont entachés.
Cet état de fait contraint le poste à vérifier in situ la quasi-totalité des actes établis localement qui lui sont présentés pour transcription, ce qui requiert une mise en œuvre particulièrement lourde en termes de moyens : véhicules, personnel, etc.
Si l’on excepte les actes non conformes, seulement 15 % environ des actes vérifiés selon cette procédure sont authentiques. A titre d’exemple, en 2011, lors de 3 missions, concernant la seule commune de Tamatave, sur les 628 actes vérifiés, 100 étaient authentiques, 330 apocryphes, 141 non conformes et 57 introuvables.
En 2012, lors de la mission effectuée au mois de janvier, sur 295 actes vérifiés, 46 étaient authentiques, 142 apocryphes, 43 non conformes et 12 introuvables.
Enfin, une mission de l’état civil de Tananarive s’est rendue au printemps 2013 à Tamatave pour y vérifier plus de 300 actes sans que le taux d’actes authentiques ne varie. Cette situation et les pratiques visant à créer une filiation fictive avec un parent français exigent la plus grande vigilance de la part de l’officier de l’état civil consulaire français.
Notre représentation diplomatique est intervenue à de nombreuses reprises auprès des autorités communales et judiciaires de Tamatave pour essayer de remédier à cette situation et parvenir à des solutions acceptables pour les usagers.
Par ailleurs, le poste a fortement encouragé nos compatriotes, notamment les futurs parents, à privilégier les actes dressés directement par les autorités consulaires dans les trente jours qui suivent la naissance de leur enfant. Cette information, qui figure sur le site internet du poste, a également été diffusée dans le réseau consulaire.
Lors de la dernière mission de l’état civil à Tamatave, des familles dont les demandes de transcription avaient fait l’objet d’un refus ont été reçues pour être informées des voies de recours possibles.
Il est à noter que l’ambassadeur et le consul général se sont personnellement impliqués dans la résolution de cette situation complexe, notamment lors d’un déplacement à Tamatave le 25 février dernier. Des représentants des familles en difficulté ont été reçus en audience. Il a été décidé à cette occasion de mettre en place à la chancellerie détachée de Tamatave une cellule d’écoute, d’explication et de conseils pour guider nos compatriotes dans leurs démarches auprès du parquet.
Enfin, afin de ne pas pénaliser davantage les familles, qui, au demeurant, ne sont pas responsables des manquements de l’état civil local, des visas de court séjour peuvent être délivrés aux résidents qui en font la demande, dans l’attente de régularisation. Cependant, la délivrance du visa n’est pas automatique et chaque situation est étudiée avec le plus grand soin par le service des visas du consulat général de France à Tananarive./.
ORIGINE DE LA REPONSE : MAE/FAE/SAEJ/ECN