Publié le 09/09/2010

Intervention de M. Gérard Larcher, Président du Sénat - 9 septembre 2010

Intervention de M. Gérard Larcher, Président du Sénat - 9 septembre 2010

M. Gérard Larcher, président du Sénat s’est adressé à l’Assemblée des Français de l’étranger le 9 septembre 2010. L’intégralité de ses propos est reproduite ci dessous.

Madame la Présidente, Monsieur le Secrétaire général, mes chers collègues Sénateurs représentants les Français établis hors
de France, Mesdames et Messieurs les membres de l’Assemblée des Français de l’étranger, Mesdames et Messieurs,

Je sais que le programme de votre treizième session plénière est particulièrement dense – et il en porte témoignage derrière moi pour une partie –, que les orateurs ont été nombreux à se succéder à la tribune. C’est, je crois, le signe de l’intérêt que
suscite votre Assemblée auprès des responsables, notamment politiques. C’est aussi le signe de l’attention qu’ils me semblent
désormais porter de manière encore plus forte à nos compatriotes établis hors de France. Près de 2,2 millions sont installés hors
de nos frontières. C’est autant que nos compatriotes vivant outre-mer. Et pourtant, les Français de métropole n’ont peut-être pas
toujours eu suffisamment conscience de cette importance numérique et du formidable atout que vous représentez pour notre
pays.

Les choses évoluent. Les Français établis à l’étranger sont aujourd’hui, me semble-t-il, mieux reconnus. Cette évolution doit
beaucoup au rôle de votre Assemblée. Permettez-moi aussi de saluer la mémoire de vos collègues ou anciens collègues décédés, dont je connaissais certains personnellement, avec qui j’ai partagé, je pense à Henry-Jean LOUSTAU, à Serge BELLANGER, à Guy PENNE – et j’ai siégé au Sénat avec Guy PENNE -, Paul CLAVE, Micheline ANGEL et Jacques NOVELLA.

Il est une institution de la République que j’ai l’honneur de présider, qui a toujours su l’importance des Français établis hors de France : le Sénat. C’est le Sénat qui, depuis la réforme institutionnelle de la Seconde Guerre mondiale, assure votre représentation parlementaire. C’est une de nos missions constitutionnelles et, je le rappelle à chaque fois, représentation des collectivités territoriales, mais représentation d’une formidable collectivité humaine que constituent les Français établis hors de France. C’est d’ailleurs une mission que remplissent avec un engagement très fort, les douze Sénateurs que vous élisez. Je voudrais les saluer très amicalement dans leur diversité et je peux porter témoignage – et ce n’est pas simplement qu’à propos de courtoisie – sur le rôle irremplaçable qu’ils jouent au Sénat, dans votre représentation, mais tout simplement aussi dans les
affaires de la Nation.

Oui, depuis 64 ans, le Sénat a tissé avec vous, avec l’Assemblée qui est la vôtre, un lien particulier, une relation de confiance. Ensemble, nous sommes attentifs aux préoccupations souvent bien spécifiques de nos compatriotes et nous essayons de faire en sorte qu’elles soient mieux connues, mieux comprises, mieux prises en compte.
Il y a un an, quasiment jour pour jour, nous nous retrouvions dans l’hémicycle du Sénat, à l’occasion de la Troisième journée des Français de l’étranger. Il y aura une nouvelle édition. Nous réfléchissons ensemble, avec mes collègues, à la date et aux programmes les plus appropriés. Je crois que cette journée des Français de l’étranger est un rendez-vous intéressant et apprécié.

En 2012, pour la première fois, nos compatriotes établis hors de France éliront 11 députés. Disposer d’une représentation dans chacune des chambres du Parlement était une demande largement partagée. Le Président de la République a engagé cette réforme. Le Sénat l’a approuvée. Par leur mode de suffrage différent, par leurs zones territoriales de compétence différentes, députés et sénateurs seront donc complémentaires et trouveront ensemble les meilleures voies pour que cette double représentation permette aux Français de l’étranger de mieux faire connaître leurs spécificités, auprès des responsables publics. Et vos parlementaires seront complémentaires de votre Assemblée. Je veux dire ma conviction qu’elle doit garder tout son rôle, toute son importance, toutes ses prérogatives et je dois dire que nous y serons attentifs et que j’y serai personnellement attentif.
(Applaudissements). Par votre expertise, par vos initiatives, membres de l’Assemblée des Français de l’étranger élus au suffrage universel direct, oui, vous êtes les interlocuteurs des pouvoirs publics, des sénateurs et demain, de nos collègues députés. Je crois que le renforcement de la représentation parlementaire doit en fait vous donner plus de responsabilités.

L’international occupe une partie significative de mon agenda. Je reçois souvent avec les présidents des groupes de métier, avec les présidents de la commission des Affaires étrangères de la Défense, les forces armées, de nombreuses délégations. La semaine prochaine, ce sera le Président de la République italienne, puis le Premier ministre du Pakistan et j’effectue, tant que je peux, des déplacements à l’étranger. À chaque fois, j’essaie de rencontrer nos compatriotes. Ces rencontres sont toujours des moments d’échanges, à la fois utiles, agréables et instructifs pour le Président du Sénat. Le regard que nos compatriotes portent sur leur pays de résidence, ce qu’ils m’en disent à travers leur expérience personnelle, professionnelle, tout simplement humaine, est toujours un moment de partage riche d’enseignements. Au travers de ces rencontres, au travers le témoignage de vos sénateurs, j’ai aussi appris à mieux vous reconnaître, à mieux comprendre vos spécificités et vos attentes. Je vois d’ailleurs, en regardant le programme de cette semaine de travail, par la diversité des sujets abordés, combien ces attentes sont diverses. Diverses, parce que votre communauté est diverse, professionnellement, socialement ; et pourtant, il y a entre vous, un
sentiment d’appartenance commune à une grande famille : celle des Français établis hors de France. Et je sais que bien souvent,
l’éloignement renforce l’attachement que vous portez à la France. Je crois qu’on ne se sent jamais aussi Français que quand on est à l’étranger. Mais, Français d’une manière ouverte, positive, rayonnante et non d’une manière recroquevillée.

Vous êtes une richesse et un atout pour notre pays, pour la promotion de ses valeurs et de sa culture et pour le renforcement
de notre compétitivité économique. Je voudrais aussi dire que parfois, je pense à la question des binationaux, qui représentent la moitié de nos compatriotes établis hors de France. Ils sont à la fois Français de l’étranger et nationaux de leurs pays de résidence. C’est au fond la chance d’une double culture : à la fois pleinement Français et attachés à leur autre patrie, ils me paraissent être un apport et un enrichissement pour notre culture nationale, mais aussi leurs spécificités doivent être prises en compte et ceux-ci méritent attention.
Parmi les attentes que j’ai ressenties, il y en a une qui me paraît bien normale. Elle est naturellement diverse suivant les pays : c’est la sécurité. Nous en avons parlé à Brazzaville, récemment, où nos compatriotes n’ont pas été épargnés par des exactions, lors des guerres civiles. Nous en avions parlé au Caire, pour nos compatriotes du Soudan : c’était il y a un peu plus de dix-huit mois. Je sais que le ministère des Affaires étrangères et européennes, notamment avec la création du Centre de crise, a mis en place un outil performant pour répondre aux urgences. Mais, il reste encore un certain nombre de questions à régler.

Une autre de vos attentes est exprimée là aussi de manière diverse, c’est la solidarité. Je salue à nouveau le rôle joué par la Caisse des Français de l’étranger, qui assure une protection sociale à plus de 200 000 de nos compatriotes. Une autre expression de la solidarité, c’est l’aide sociale apportée aux plus démunis de nos compatriotes. 16 millions d’euros cette année, des crédits qui ont fait l’objet d’un combat partagé sur tous les fauteuils dans notre hémicycle. On peut en porter témoignage : je suis et je demeurerai à leur côté sur ce sujet, et je le redis, c’est un sujet tout à fait essentiel.

La solidarité, c’est aussi les aides à la scolarité. Bourses scolaires et gratuité du lycée pour tous les Français, je sais que cette mesure a fait débat encore. Je l’entends. L’enseignement français à l’étranger fait l’objet d’un récent rapport de la mission d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale. Sur la question spécifique de la prise en charge des frais de scolarité, vous le savez, deux parlementaires ont été missionnés : un sénateur, Sophie JOISSAINS ; un député, Geneviève COLOT ; ils rendront leur rapport au Président de la République, qui leur a confié cette mission. J’ai rencontré le sénateur en charge de ce dossier, pour lui faire part d’un certain
nombre de choses. Là aussi, le Sénat tout entier sera attentif aux suites qui seront réservées à ces rapports.

Vous avez évoqué d’autres sujets cette semaine. Je ne vais pas tous les citer. Mais, un point particulier, l’année 2012 est l’organisation d’un calendrier électoral particulièrement chargé : élection présidentielle, élections législatives – qui pour la première fois, concerneront directement onze circonscriptions territoriales -. Cela fait déjà quatre journées de scrutin. Le cinquième scrutin pour nos compatriotes d’Europe et d’Asie, c’est un défi logistique et un risque de participation fortement amoindrie. Une proposition de loi a été déposée pour proroger d’un an le mandat des élus de ces deux zones. C’est un dossier que nous allons aussi suivre de près.

Voilà, mes chers collègues, quelques éléments du message que je souhaitais vous adresser et peut-être, répondre à quelques
interrogations et quelques questions, même si tout à l’heure, je rentre de Bruxelles, juste avant les questions d’actualité, je rencontrais le président de la Commission européenne pendant toute la matinée sur un certain nombre de sujets et il faudra que je m’exprime, autour de 18 heures 15. Voyez dans ma présence, pas simplement un geste d’amitié ou de courtoisie. Pour nous, au Sénat, la question des Français de l’étranger est extrêmement présente, naturellement incarnée par vos douze sénateurs, mais elle concerne l’ensemble de notre Assemblée. C’est mon engagement personnel et c’est là où j’apporte un amendement à la formule de Gambetta : « Nous ne sommes pas que le Grand conseil des communes de France ; nous sommes le Grand conseil des collectivités territoriales de France et des Français établis hors de France ».

Je vous remercie.