Publié le 26/12/2012

Intervention de Mme Hélène CONWAY-MOURET, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée des français de l’étranger.

Intervention de Mme Hélène CONWAY-MOURET, ministre déléguée auprès du (...)

Madame Hélène CONWAY-MOURET, Ministre déléguée chargée des Français de l’étranger s’est adressée à l’Assemblée le 14 décembre 2012

Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames les Conseillères,
Messieurs les Conseillers,
Chers amis,

Madame Hélène CONWAY-MOURET, ministre délégué chargée des Français de l’étranger

Je vous remercie de l’invitation à venir m’exprimer devant le bureau de votre assemblée aujourd’hui.
Au cours de ces six derniers mois, j’ai souhaité aller à la rencontre de la communauté française parce que de chacune de ces rencontres j’attendais quelque chose.
Mes déplacements m’ont ainsi conduite
en Asie (Hong Kong, Pékin, Tokyo),
en Asie du sud-est avec le Premier ministre (Singapour, Philippines),
en Afrique sub-saharienne (à Dakar avec le Président de la République, et je rentre de Côte d’Ivoire), en Afrique du sud,
en Afrique du Nord (au Maroc, et j’irai en Algérie, en Libye et en Tunisie au mois de janvier),
en Europe (Bruxelles, Madrid, Lisbonne, Londres, Dublin et je me rendrai en Grèce au début de l’année 2013).
Je serai aux Etats-Unis au mois de mars et sur le continent sud-américain dans le courant du premier trimestre 2013.

Il est essentiel pour moi d’aller à la rencontre des Français, de recueillir les témoignages de nos compatriotes sur leurs situations sociales, économiques et culturelles. Ces voyages me permettent aussi de partager ces échanges avec vous et de compléter mon analyse de l’évolution de nos communautés et du service que nous leur rendons.

Ces déplacements révèlent aussi un certain nombre de besoins que nous avons l’opportunité de satisfaire, grâce à l’existence de ce ministère qui leur est spécifiquement consacré. Dans bien des domaines, où la majorité précédente n’avait pas jugé utile d’agir, il n’est plus temps d’attendre. L’opportunité rejoint ici la nécessité.

Ces besoins, vous le savez, ont inspiré les réformes que vous portez depuis de nombreuses années. Je pense en particulier à notre souci d’accompagner nos concitoyens qui désirent s’expatrier sans oublier ceux qui désirent rentrer.

Pour réussir, ces réformes doivent s’inscrire en cohérence avec la politique gouvernementale et dans un contexte budgétaire particulier. Elles doivent aussi tenir compte des particularités régionales.

Madame Hélène CONWAY-MOURET, ministre délégué chargée des Français de l’étranger

Elus des Français de l’étranger, la plupart d’entre vous vivez dans des pays touchés par des crises financières, économiques et sociales. La France n’est malheureusement pas épargnée. Vous comprendrez aisément le risque que nous faisons courir à notre modèle social, et donc au pacte républicain, si nous ne prenons pas rapidement des mesures courageuses.

Ces efforts ne seront acceptables et acceptés que s’ils sont guidés par une exigence de justice sociale et je peux vous assurer que mon action s’inscrit totalement dans ce cadre. Je répète que les efforts consentis seront équitablement répartis, qu’ils préserveront les plus modestes et les missions prioritaires de l’Etat.

Lors de la session plénière de l’Assemblée des Français de l’Etranger, en septembre, je vous ai présenté mon plan d’action. Trois mois se sont écoulés. Cette réunion du bureau est pour moi l’occasion de vous exposer l’état d’avancement des projets.

Cette année, au-delà de la présentation du budget de l’Etat, l’ordre du jour que vous avez établi diffère sensiblement des exercices précédents puisque vous avez souhaité que l’essentiel de vos travaux se concentrent sur deux sujets : la réforme de l’aide à la scolarité et la réforme de la représentation des Français à l’étranger. Deux grands chantiers sur lesquels je veux non seulement vous donner des informations, mais aussi et surtout vous indiquer les objectifs et les ambitions du gouvernement.

La réforme des aides à la scolarité
Je ne reviendrai pas sur la suppression de la PEC. Je tiens seulement à signaler que très peu de familles qui en profitaient ont finalement demandé à bénéficier des mesures exceptionnelles que nous avions mises en place. C’est la démonstration que nous avions raison en mettant fin à une mesure coûteuse et socialement inéquitable.
Fort heureusement, nous avons appliqué cette suppression dès la rentrée : nous étions sinon dans l’incapacité de verser les bourses sur critères sociaux. En effet, le budget nécessaire avait été largement sous-évalué cette année, comme les années précédentes d’ailleurs et comme les budgets préparés par le gouvernement précédent et pour les années à venir.
Je tiens à rappeler ici qu’en 2011, malgré la mise en place de mesures d’économie, ce sont 10 millions d’euros qui avaient dû être redéployés à partir des crédits prévus pour l’aide au développement. Ne comptez pas sur moi pour renouveler ce type d’opération à l’avenir. Elus des Français résidant sur tous les continents, vous connaissez les enjeux de nos politiques de développement. Leur budget n’est pas une variable d’ajustement.

Je fais le choix de la responsabilité et de la transparence. J’ai d’une part obtenu l’abondement de 17 millions de l’enveloppe budgétaire pour 2013 qui sera ainsi de 110 millions pour atteindre 125 millions en 2015. D’autre part, j’ai souhaité réformer en profondeur les critères d’attribution des bourses. J’ai insisté pour que le nouveau système soit progressif et plus équitable. Il importe également de le rendre pérenne. Le choix d’un système éducatif est un choix qui engage les familles pour longtemps. La réforme doit leur offrir une visibilité de l’accompagnement que l’Etat leur donne, ce que ne permettait pas l’ancien système.

Le directeur de la DFAE vous présentera cet après-midi le détail de la réforme. Vous constaterez qu’elle répond aux objectifs que nous nous étions fixés collectivement :
  La correction des inégalités de traitement, pour ne pas dire des injustices, entre familles et entre zones géographiques, puisque certaines régions comme l’Amérique du Sud ou l’Afrique subsaharienne verront leur situation s’améliorer ;
  l’ouverture à davantage de familles ;
  la maîtrise de l’évolution budgétaire du dispositif
  la scolarisation du plus grand nombre.

Je tiens à remercier ici les membres de la Commission nationale des bourses qui se sont réunis longuement à trois reprises. Leurs contributions précieuses, leur sens des responsabilités et de l’intérêt général ont permis d’améliorer les propositions et de revoir un grand nombre de règles de fonctionnement des Commissions locales.

Puisque le nouveau système distribue les aides à partir de nouveaux critères, certaines familles verront les quotités octroyées diminuer. Une attention toute particulière leur sera portée. C’est pourquoi j’ai demandé la mise en place de mesures qui limiteront, pour les familles concernées en 2013, les pertes de quotités.

J’ai souhaité également donner davantage de responsabilités aux Commissions locales de bourses, car ce sont leurs membres qui connaissent bien les communautés françaises. Je sais votre engagement dans la tenue des CLB et vous fais pleinement confiance pour traiter avec justice les dossiers qui vous seront soumis.

L’assurance d’un budget en croissance, compatible avec des règles plus justes de calcul des bourses : nous nous plaçons en rupture avec le passé et je l’assume.

J’en viens maintenant à la représentation politique des Français de l’étranger.

Réforme de la représentation politique

Celle qui existe aujourd’hui est le résultat d’une longue évolution, dont vous me permettrez de rappeler les grandes étapes.

La première, c’est la création du Conseil supérieur des Français de l’Etranger (CSFE), par décret, en 1948. Le conseil est créé auprès du ministre des affaires étrangères pour fournir des avis sur les questions et les projets intéressant les Français domiciliés à l’étranger. Dix ans plus tard, en 1958, la constitution dispose que les Français de l’étranger seront représentés au Sénat.

Mais c’est par la loi du 7 juin 1982, puis celle du 18 mai 1983, qu’est réellement consacrée la représentation politique des Français de l’étranger. La désignation des délégués est remplacée par leur élection au suffrage universel direct au Conseil supérieur des Français de l’étranger. Ces délégués constituent alors le corps électoral pour l’élection de 12 sénateurs.

Claude Cheysson est alors ministre des Relations Extérieures du gouvernement de Pierre Mauroy. C’est lui qui a porté au Parlement cette avancée démocratique incontestable. Claude Cheysson est décédé le 15 octobre dernier et je tiens aujourd’hui à lui rendre un hommage appuyé.

En 2004, le CSFE devient l’Assemblée des Français de l’étranger. Par la réforme constitutionnelle de juillet 2008, les Français de l’étranger disposent d’une représentation à l’Assemblée nationale.

Ainsi en 2012, trente ans après la loi relative au Conseil supérieur des Français de l’étranger, nos compatriotes ont une représentation complète au Parlement et ils sont également représentés au gouvernement.

Les conseillers de l’Assemblée des Français de l’étranger ont été les acteurs de cette évolution.

Trente ans après l’étape décisive que constitua la loi de juin 1982, le moment est venu d’engager une nouvelle étape pour améliorer la représentation politique des Français de l’étranger. Cette réforme doit être comprise comme l’expression même de la reconnaissance de votre travail, vous les conseillers à l’AFE, élus de terrain à la disponibilité permanente.

Le 3 septembre dernier, le ministre des affaires étrangères a fixé devant l’assemblée plénière les objectifs de la réforme : une plus grande proximité, une meilleure représentativité, la révision du collège électoral des sénateurs, sa soutenabilité financière.

La commission des lois et règlement de l’AFE a émis un avis. Vous avez adopté à l’unanimité une motion relative à « la réforme des Français de l’étranger » à partir du cadre même fixé par le ministre des Affaires étrangères.

Ces objectifs constituent les principes mêmes de la réforme qui prendra la forme d’un projet de loi. Validé par le ministre des Affaires étrangères, il sera présenté en Conseil des ministres dans les premières semaines de l’année 2013. Ce projet repose sur les points suivants :

Premier principe : un principe de proximité. Je souhaite que soit renforcé le lien que vous avez établi avec nos compatriotes, au plus près d’eux.
 Je propose l’élection de conseillers consulaires élus au suffrage universel direct au scrutin proportionnel dans le cadre des circonscriptions consulaires. Le nombre des élus qui représentent nos compatriotes passera ainsi de 155 à 432.
 ils formeront des conseils consulaires allant jusqu’à 9 conseillers en fonction du nombre d’inscrits dans les circonscriptions.

Second principe : renforcement des compétences des conseillers élus :
 L’exercice de ces compétences se fera au niveau local car c’est au niveau local que se prennent les décisions concernant les Français de l’étranger.
 C’est donc dans le cadre des réunions des conseils consulaires que seront traitées les questions actuellement suivies par les comités consulaires spécifiques.
 Le champ d’intervention des conseils consulaires sera élargi par rapport à celui des comités actuels : outre les questions relatives à la protection et l’action sociales, aux aides à la scolarité, je souhaite qu’ils soient consultés sur toute question relative au travail, à l’emploi, à la formation professionnelle, la sécurité des communautés françaises, mais aussi sur l’attribution des aides financières individuelles allouées par l’Office National des Anciens Combattants.
 Ces conseils consulaires auront une réelle légitimité puisqu’ils seront composés d’élus. Obligatoirement consultés, ils rendront des avis formels sur toute question concernant les Français de l’étranger.

Je propose que parmi ces conseillers consulaires, 81 soient désignés pour assurer le lien avec la France en venant siéger à Paris dans ce que sera la nouvelle Assemblée des Français de l’étranger.

 Ces 81 conseillers consulaires délégués à l’AFE seront élus par les conseillers consulaires et parmi eux
 Dans le cadre de zones géographiques cohérentes regroupant plusieurs circonscriptions consulaires.

La nouvelle assemblée des Français de l’étranger est une assemblée d’expertise et de conseil, dont le rôle politique est renforcé. Sans doute l’exemple d’une autre assemblée consultative, le Conseil Economique Social et Environnemental, peut- il nous inspirer ici.

• Les conseillers consulaires délégués à l’Assemblée éliront leur président. Ils seront les détenteurs d’une parole politique.

• Ce n’est plus le directeur des Français à l’étranger et de l’administration consulaire qui leur rendra compte mais le ministre des affaires étrangères. Il présentera chaque année un rapport dressant le bilan de l’action de l’administration dans les domaines intéressant directement les Français de l’étranger et un débat s’en suivra.
• Dès le dépôt du projet de loi de finances de l’année au Parlement, le Gouvernement informera l’assemblée des Français de l’étranger des dispositions relatives à ces questions. L’assemblée sera donc informée du budget en même temps que le Parlement. Les conseillers pourront faire part de leurs observations au Gouvernement.

 Répondant à la feuille de route de Laurent Fabius et aux préoccupations de la commission des lois et règlements, et suivant les préconisations du rapport de Lionel Jospin, le collège électoral des sénateurs sera élargi. Il sera constitué de l’ensemble des conseillers consulaires auquel s’ajouteront éventuellement des délégués supplémentaires. Nous reviendrons ainsi à un mode d’élection plus conforme aux règles appliquées en France.

Enfin, la contrainte de soutenabilité financière est respectée puisque la réforme se fera à budget constant tout en assurant à chaque conseiller les moyens nécessaires au bon exercice de son mandat local.

Je souhaite que le nouveau collège électoral s’applique au renouvellement sénatorial de 2014.
Pour cela, il convient que les élections à l’AFE prévues en juin 2013 soient reportées.

Nous sommes soumis à un calendrier très serré. Le gouvernement est néanmoins prêt à l’assumer malgré l’existence d’un calendrier législatif très encombré.

Chers amis,
Vous le voyez, nous sommes au travail, conscients des responsabilités qui nous incombent.
Avant de répondre à vos questions je souhaite partager avec vous une pensée pour Paul Graf qui nous a quittés le mois dernier. Nous partagions un même attachement pour la France et un même engagement au service de nos compatriotes qui vivent à l’étranger. Je tiens à saluer ce compagnon inoubliable. Il était une source d’inspiration pour tous ceux qui ont eu le privilège de l’approcher.

Je vous remercie.