Retraite des Français qui ont effectué une partie de leur carrière hors de France
Question écrite au gouvernement de M. Alexandre Chateau-Ducos, Conseillère des Français de l’étranger au Luxembourg, également membre élu de l’AFE
Le calcul du salaire annuel moyen (SAM) à partir des 25 meilleures années n’est pas équitable.
Pour des français et des françaises qui ont travaillé une partie de leur carrière à l’étranger, certaines années de travail et de cotisations en France, ne provoquent pas une augmentation mais au contraire une diminution de la retraite française. D’autant plus pour des femmes aux carrières hachées. Les années de très faible salaire peuvent réduire les droits acquis par les meilleures années de salaire et provoquer une baisse de la retraite de plus de 40 %.
Pourquoi ? La retraite est basée sur le montant des salaires et des cotisations, mais ce sont les montants des salaires annuels qui sont pris en compte dans le calcul de la retraite. Une carrière est constituée d’années de 12 mois de salaire et d’années incomplètes de peu de mois de salaire (job d’étudiants, service militaire, recherche d’emplois, maladie, formations, éducation des enfants, années à cheval sur deux pays). Pour une carrière effectuée entièrement en France, le calcul actuel permet non seulement de ne prendre en compte que les meilleures années mais surtout d’exclure les années incomplètes avec les plus mauvaises années.
Pour les carrières de moins de 25 années complètes en France, le principal enjeu n’est pas que le salaire annuel moyen (SAM) soit calculé à partir des meilleures années de salaire, mais que les années incomplètes de très faible salaire soient aussi prises en compte et « massacrent » ce SAM (ces années peuvent être 20, 30 fois plus faibles que les autres années). Les années de faible salaire annuel peuvent donc provoquer une baisse de la retraite parce que la baisse due à la diminution du SAM est plus importante que l’augmentation due à l’addition de trimestres. Ce mécanisme a été décrit par le Comité d’Orientation des Retraites (COR) dans son 12e rapport p107. Des accords entre les pays, s’il y en a, sont censés atténuer ce phénomène, c’est loin d’être toujours le cas, il n’y a même pas d’accord pour le calcul du SAM avec tous les pays de l’UE.
Pour ceux qui vont partir en retraite dans les années à venir, la retraite sera basée essentiellement 1) sur les années déjà cotisées et 2) sur le calcul de retraite actuel et non pas sur un éventuel futur calcul de retraite qui ne s’appliquerait qu’aux années cotisées après 2025.
Quelle mesure le gouvernement envisage-t-il de prendre pour rendre le système de retraite actuel équitable ? Il peut l’être et avec des mesures simples qui peuvent être appliquées dès à présent.
1.Calculer le salaire annuel moyen à partir d’un pourcentage maximum d’années et non plus à partir d’un nombre fixe de 25 années, quand la carrière est partiellement effectuée en France (et sans conditionner cette mesure à des accords entre pays)
2. Exclure du calcul du SAM toutes les années de trop faible salaire annuel dont la prise en compte diminuerait les droits à la retraite acquis pour les autres années de la carrière (lorsque la prise en compte de ces années provoquerait une baisse du SAM plus importante que l’augmentation dû à l’addition des trimestres).
Le gouvernement compte-t-il mettre en œuvre par exemple ce type de propositions ?
L’analyse proposée par M. Chateau-Ducos sur le mécanisme dit des « 25 meilleures années », en vigueur dans le régime général, est pertinente. En effet, ce mécanisme supposé protecteur s’avère en réalité parfois inéquitable et désavantageux pour les carrières dites incomplètes ou témoignant « d’accidents de carrières ». Cette analyse se trouvait au cœur du projet instituant un système universel de retraite, adopté en première lecture à l’Assemblée au premier trimestre de l’année 2020. Vous pouvez d’ailleurs retrouver ces éléments dans l’étude d’impact de ce projet de loi.
Par ailleurs, si elle est en vigueur dans le régime général, la pension n’est toutefois pas toujours calculée à l’aune de cette règle. Par exemple, pour les retraites de l’État, la règle des 6 derniers mois du traitement indiciaire s’applique pour le calcul de la pension de retraite. Dans les régimes complémentaires en points – tel que celui des salariés du privé, l’Agirc-Arrco -, c’est l’ensemble de la carrière qui est pris en considération.
Afin que les mêmes règles s’appliquent dans tous les cas de figure, le Gouvernement proposait, via le projet de loi instituant un système universel de retraite, une réforme de l’ensemble des régimes, en prenant l’ensemble de la carrière comme référence. Ce mode de calcul était doublé de mécanismes très protecteurs pour prendre en compte les accidents de carrières, par l’octroi notamment de « points de solidarité » au titre des accidents de carrières (chômage indemnisé, par exemple) et par la création d’une pension minimale à hauteur de 85 % du SMIC net pour les carrières complètes.
S’agissant du cas spécifique des Français expatriés dans un pays sans accord particulier, je vous prie de noter qu’il existe une possibilité de s’affilier volontairement, via la Caisse des Français de l’étranger notamment, ce qui permet de continuer de valider des droits dans le système français
Je souhaite enfin rappeler que l’objectif d’instaurer un nouveau régime de retraite universel, sur lequel le président de la République s’est engagé en 2017, est maintenu. Néanmoins, si cette réforme reste évidemment nécessaire, elle n’est pas la priorité de l’action du Gouvernement aujourd’hui, tant il se consacre à la gestion et à la sortie de crise.
Origine de la réponse : Cabinet du Secrétaire d’État chargé des retraites et de la santé au travail