Publié le 16/12/2011

Discours du Secrétaire d’Etat auprès du Ministre d’Etat, Ministre des Affaires étrangères et européennes, chargé des Français de l’étranger, devant le Bureau de l’Assemblée des Français de l’étranger - 16 décembre 2011

Discours du Secrétaire d'Etat auprès du Ministre d'Etat, (...)

M. Edouard COURTIAL, Secrétaire d’Etat auprès du Ministre d’Etat, Ministre des Affaires étrangères et européennes, chargé des Français de l’étranger, s’est adressé au Bureau de l’Assemblée des Français de l’étranger le 16 décembre 2011.

Merci, Madame la Présidente, ma Chère Denise.

Mesdames et Messieurs les Sénateurs, Mesdames et Messieurs les vice-présidents, Mesdames et Messieurs les membres de l’Assemblée des Français de l’étranger, Monsieur le Directeur des Français à l’étranger et de l’Administration consulaire, Mesdames et Messieurs,
Merci tout d’abord de votre invitation à m’exprimer devant vous aujourd’hui. C’est une marque d’intérêt que j’apprécie évidemment. Il est naturel que le Secrétaire d’État chargé des Français de l’étranger entretienne le dialogue avec l’Assemblée des Français de l’étranger.
Lorsque je me suis adressé à vous, en septembre dernier, je vous ai annoncé les grands axes de mon action. Je vous ai dit ce que je ferai. J’ai fait ce que j’ai dit, en premier lieu, je vous ai annoncé que j’irai à la rencontre des Français. Depuis ma nomination, j’ai beaucoup voyagé. Je ne vois pas d’ailleurs comment j’aurais pu faire autrement pour rencontrer nos compatriotes là où ils vivent, pour entendre de vive voix leurs préoccupations, au plus près des réalités.

Chaque fois que j’en ai eu l’occasion, j’ai visité l’établissement d’enseignement français, pour en souligner l’excellence, évoquer les perspectives de développement avec ses responsables et avec les autorités locales, dialoguer avec les élèves et leurs familles, sur le soutien que peut leur apporter l’État et m’entretenir des difficultés du moment avec la communauté éducative.

C’est par exemple ce que j’ai fait au Lycée René Cassin, à Oslo ; aux collège et lycée Voltaire à Berlin ; à l’école française de Manille ; au lycée français de Madrid ; au lycée Rochambeau à Washington ou au lycée Jules Supervieille à Montevideo.

Dans cet ordre d’idée, j’ai visité les Charters School, à New York et à la Nouvelle-Orléans, forme de partenariat dont nous pourrions nous inspirer pour développer l’enseignement français à l’étranger, dans l’esprit de la labellisation France Éducation.

J’ai aussi voulu aller à la rencontre d’entrepreneurs et de décideurs économiques avec qui, sans restriction ni tabou, j’ai dressé le tableau local de nos forces, de nos chances et de nos atouts, mais aussi de nos faiblesses, de nos handicaps et de nos défauts en matière de compétitivité.

À Wuhan, je suis allé me rendre compte des conditions d’installation et de vie de nos compatriotes venus créer une chaîne de montage automobile au centre de la Chine. J’ai aussi pris la mesure d’opérations plus modestes, comme cette boulangerie franchisée ouverte par de jeunes entrepreneurs à Georgetown. Je me suis adressé aux élèves de l’Essec à Singapour, pépinière de responsables économiques. Aujourd’hui camarades de promotion assis sur les mêmes bancs, ces garçons et ces filles seront demain des partenaires sans doute, des associés sûrement, des concurrents peut-être, mais ayant en commun d’avoir été formés à l’École française des affaires, quel que soit le contexte, ils se comprendront. Partout, j’ai rencontré des Français dynamiques, entreprenants, courageux et créatifs, dont nous pouvons être fiers. Comme nous pouvons être fiers des représentants des ONG qui, à Haïti, portent haut les couleurs de la solidarité de la France avec les peuples déshérités. Comme nous pouvons être fiers de nos associations qui se dévouent pour nos compatriotes dans le besoin. Je l’ai par exemple constaté lorsque j’ai visité la maison de retraite à Santiago du Chili, qui adoucit les vieux jours de nos compatriotes.

Je vous ai dit ensuite que je souhaitais travailler avec les élus. Je voudrais à cet égard souligner la qualité de mon dialogue avec les élus de l’Assemblée des Français de l’étranger à chacune de mes étapes. J’en témoigne, les relations ont toujours été des plus cordiales, dans le plus parfait esprit républicain. Les échanges ont toujours été très constructifs, car évoqués sur place, les problèmes locaux apportent une plus-value incontestable à leur compréhension. Je l’ai fait également le 10 novembre, dans le contexte parlementaire, lors d’une audition par la commission des Affaires étrangères et des Forces armées du Sénat. Les débats ont été riches et denses sur les thèmes de la sécurité, de la protection sociale ou de l’enseignement. Sujets dont je voudrais vous faire remarquer qu’ils figurent expressément dans mon décret d’attribution. C’est une innovation importante sur laquelle je veux mettre l’accent. J’ai beaucoup apprécié ce contact de terrain. Je tire de l’expérience acquise plusieurs enseignements, idées ou réflexions dont je voudrais maintenant vous faire part. D’abord, il me paraît nécessaire d’avoir une approche globale de la situation des Français de l’étranger, ce n’est pas la simple transposition de celle des Français de métropole ou d’Outre-mer. Les différentes mesures utiles, intelligentes et pertinentes prises en leur faveur ces dernières années, doivent désormais être restituées, resituées dans un ensemble cohérent, avec des perspectives à moyen et long terme. Quelle politique voulons-nous pour les Français de l’étranger ? Quelle place doivent-ils avoir sur notre échiquier national ? Loin de les atténuer, de les aplanir ou de les ignorer, cette vision globale doit prendre en compte les particularismes géographiques ou sociologiques.

C’est le sens des tables rondes géographiques qui ont été inaugurées lors de session de septembre. Elles me semblent nécessaires. De mon point de vue, il faut les maintenir, les enrichir et bien les préparer, afin qu’elles permettent de cerner des problématiques dans toute la variété de leurs aspects, de les examiner de façon approfondie, afin d’esquisser des solutions.

Je vous propose de prolonger cette vision des choses, en dressant un panorama des conditions de vie dans chaque région du monde, en commençant par l’Europe, pour rester cohérent avec la première table ronde. Menée et coordonnée par la commission de l’Union européenne, avec l’apport de tous les élus de la zone, cette étude ferait émerger des problématiques et des propositions de solutions par pays et de façon synthétique, pour l’ensemble du continent. Un premier rapport d’étape pourrait être présenté lors de la prochaine session.

Je suis convaincu que les Français de l’étranger sont une vraie richesse pour la France. Il est facile de dire qu’ils sont aux avant-postes de la mondialisation, qu’ils comprennent ou mieux encore, qu’ils ressentent physiquement et instinctivement les pulsations de ce monde avec toutes les forces qui le parcourent. Cela est facile, oui, mais telle est la vérité ! Ils ne sont ni des inclassables partis courir l’aventure ou des originaux en mal d’exotisme. Vous le savez bien, cette image n’a rien à voir avec la vérité. Pourtant, elle persiste dans l’esprit de beaucoup ; c’est pourquoi il nous faut aider les Français de l’étranger à s’en débarrasser. Le projet d’une année des Français de l’étranger en 2014 que j’évoquais en septembre me paraît être un moyen de mieux faire connaitre les Français de l’étranger qui, pendant un an, pourraient se mettre en valeur en montrant leurs réalisations, leurs projets et leurs créations. Ce serait une excellente occasion, inédite de surcroît, de montrer toutes leurs capacités, tout leur talent et tous leurs savoir-faire. Ce n’est pas un gadget, j’ai la conviction qu’ils ont une chance à saisir. Je réitère donc ma proposition d’étudier ce projet, car si l’Assemblée des Français de l’étranger ne le porte pas, qui le fera ? En outre, je crois aussi qu’il faut appeler l’attention des Français de l’étranger sur l’interprétation que l’on ne manquera pas de faire de leur participation au scrutin de l’année prochaine. Elle sera analysée, non seulement comme la mesure de leur civisme, mais aussi comme le signe de leur volonté clairement affirmée de faire partie de la Nation, de peser sur ses choix, de faire véritablement entendre la voix d’une composante désormais importante du peuple français. À travers les scrutins de 2012, les Français de l’étranger ont une carte majeure à jouer. Il faut qu’ils le comprennent et qu’ils saisissent cette occasion.

J’ai trouvé aussi dans les consulats généraux, consulats et sections consulaires que j’ai visités, des femmes et des hommes dévoués, compétents et disponibles. Nous avons, avec notre réseau consulaire, un instrument d’excellence. Il est sans équivalent. Soyez assurés – et je le dis de la façon la plus claire devant vous, devant les Sénateurs et le Directeur des Français à l’étranger et de l’administration consulaire – que je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour le préserver et le soutenir. Partout le travail de préparation des élections est bien engagé. Les encouragements à s’inscrire sur les listes électorales consulaires ont porté leurs fruits. Le cap du million d’électeur a été franchi ces derniers jours. Le millionième est un jeune diplômé d’une école de Grenoble qui vient de s’établir à Moscou, M. Elie ZELERANSKI qui doit entendre vos applaudissements.

J’ai aussi pu mesurer les progrès de l’administration électronique et son impact sur nos compatriotes. Succédant au Guichet d’administration électronique, monconsulat.fr que j’annonçais en septembre, est opérationnel depuis le 18 novembre. Déjà plus de 25 000 connexions ont été enregistrées. De mon point de vue, monconsulat.fr a vocation, à terme, à remplir la même mission et à rendre les mêmes services à l’égard des Français de l’étranger que monservicepublic.fr. En tout état de cause, le succès de son lancement est de bon augure pour le vote électronique.

Mesdames et Messieurs, partout aussi, on m’a alerté sur ce que les Français considèrent comme des lourdeurs administratives. Mais, faisons honnêtement la part des choses : s’il faut combattre la complexité, elle se justifie parfois dans l’intérêt même des administrés. C’est le cas en matière de documents d’identité ou de voyages, pour se prémunir contre les risques de fraude. Parfois, j’en conviens, ce risque de fraude doit être ramené à sa juste proportion. Je voudrais aborder à ce propos la question des certificats de vie ou d’existence et je vois Michèle MALIVEL qui s’était entretenue de ce sujet sourire – non seulement parce que j’en ai pris l’engagement lors de mon intervention au Sénat le 22 novembre dernier, en réponse à une question de Madame Claudine LEPAGE, mais aussi parce que c’est à mon sens un véritable cas d’école qui illustre la démarche qu’il convient de suivre. C’est une préoccupation ancienne encore mise en exergue par la table ronde Europe. Elle répond à notre objectif commun visant à faciliter la vie des Français. La transposition en bloc à l’étranger d’un dispositif concernant les Français vivant sur le territoire national conduit à une impasse. Une approche d’ensemble, une vue globale est nécessaire, car les enjeux sont multiples. Un enjeu administratif : quelles procédures mettre en œuvre ? Qui établira le formulaire ? Quand ? Selon quelle fréquence ? L’administration a besoin de ces réponses pour s’organiser. Un enjeu de relation avec les administrés : le nouveau dispositif doit être simple, rapide et présenter des avantages certains par rapport à la situation précédente. Il ne doit pas faire peser la suspicion sur celui à qui on réclame le certificat de vie. Un enjeu en matière de lutte contre la fraude : évidemment, dans leur grande majorité, les retraités ne sont pas des fraudeurs. Mais, lutter contre la fraude est l’intérêt de tous. Convenons qu’en matière de versement de pensions, les risques de fraude ne sont pas nuls ; convenons aussi que le fait de demander une fois par an un certificat de vie ne prémunit pas contre le versement indu d’une pension si le décès survient avant la prochaine demande de preuve d’existence. C’est une population ciblée, mais qui ne concerne pas que des retraités français. L’approche d’ensemble ne fait pas obstacle à des solutions différentes selon le cadre géographique. Enfin, pour toutes ces raisons, seule une réflexion ministérielle permettra d’aboutir. Des contacts ont déjà eu lieu au niveau de mon cabinet. J’ai obtenu, comme je l’ai annoncé, qu’une large concertation soit engagée. Elle débutera en janvier.

Mesdames et Messieurs, devoir repousser la solution à un problème dont toutes les ramifications échappent à nos compatriotes retraités a un côté agaçant. Je déplore que l’émergence de solutions opérationnelles à des problèmes anciens bien connus prenne autant de temps. Mais, comme je l’ai dit à l’adresse des Sénateurs de la commission des Affaires étrangères et des Forces armées du Sénat, mon rôle ne consiste pas à faire des coups, ni à vouloir attacher mon nom à une loi ou à me lancer dans des réformes qui ne verraient pas le jour avant l’élection du Président de la République et les élections législatives. Je veux faire œuvre utile. Je veux mettre toute mon énergie, ma capacité d’écoute et ma ténacité à faire avancer les dossiers concrets et à trouver des solutions pratiques. C’est ainsi que je conçois mon rôle de Secrétaire d’État chargé des Français de l’étranger. Voilà, Mesdames et Messieurs, les quelques mots que je voulais avoir devant vous, en vous remerciant pour votre accueil et en vous disant très sincèrement, après l’usage de ces deux mois et demi d’expérience, d’abord la fierté et l’honneur qui sont les miens, de pouvoir servir au sein du gouvernement, maintenant Français de l’étranger à vos côtés, mais aussi la richesse des dialogues que j’ai pu avoir avec celles et ceux d’entre vous que j’ai pu rencontrer sur le terrain.

Merci beaucoup.